Comme mon quotidien me donne envie de me pendre avec mes intestins, toute narration tomberait vite dans le pathos. Alors, ... ch'ais pô ... Bof ... Mais, on se calme et on se détend du gland (ou de c'que vous voulez, quand la nature ne vous a pas gratifiée de ce superbe outil), venez avec moi au coin du feu.
Je vais plonger dans mes souvenirs de vieux marin (non, j'déconne, je sais à peine nager ...) et vous raconter une bonne vieille histoire de l'onc' Fred. En fait, c'est un truc que j'ai toujours eu envie d'écrire.
C'était en 2003, nous étions ( Charline, un pote - Cyrille – et moi) en transit à Johannesburg, direction Paris. Nous sortions d'un mois de crapahutage à travers l'Afrique du Sud (sans aucun problème, sauf quelques chevilles pétées et des doigts de pieds explosés).
Le transit (de la gare routière à l'aéroport) dura plusieurs heures. Malgré le conseil inverse de tous, nous partions nous promener en ville. Très vite, nous nous retrouvions dans un marché de quartier. Tout y était trop ... Trop de bruits, trop d'odeurs, trop de couleurs. Il me semblait être dans une bulle.
L'ambiance était étrange. Un, je ne sais quoi d'imperceptible, que Cyrille finissait par pointer du doigt : « Tiens, on est les seuls blancs », et tout le monde nous suivait du regard.
Le long des étals, je voyais un type marcher à mon rythme, mais du côté des vendeurs. Il me regardait. Entre deux commerces, il sortit pour me faire face. Je m'arrêtai.
Détendu, je le regardai dans les yeux. Ils étaient noirs et glacés.
Au niveau de mon nombril, je vis une lame brillante effectuer un cercle. « Tiens, on dirait mon couteau en plus grand ... », me dis-je, comme un con. Toujours sur mon nuage, je ne réagissais pas.
Le type me scruttait de pied en cape. N'ayant rien de clinquant sur moi, il passait au suivant. Il se dirigea vers Charline et lui posa le couteau sur la sangle de son sac à main.
Je m'étais retourné pour suivre le trajet de mon assaillant qui ne voulait plus de moi.
Je constatais la présence, derrière Cyrille, d'un mec avec un gros schlass, avec comme mission, de nous bloquer tout moyen de repli.
Charline, se la joua « Parisienne Style », elle commença à négocier. Le surin qui se posa sur sa gorge coupa court à toute tergiversation.
J'étais paralysé ... Je criais à l'intérieur mais ne pouvais, ni n'osais bouger. J'étais spectateur d'un film réel.
Cyrille, dans un accès de survie, se mit à faire le cochon (c'est le premier truc qui lui est venu). Il fallait qu'on se fasse remarquer pour s'en sortir. Charline trouva que faire le klaxon était bien plus efficace.
Au milieu de ces hésitations, je restais pétrifié.
Pourtant, un événement survint pour devenir le seul souvenir commun que nous aurions.
Loin, au fond du marché, je voyais un keuf qui passait. Il nous vit, c'est sûr, il m'a regardé dans les yeux. Et plutôt que de venir nous aider, il se cassa à toute enjambée : « Ah, l'enculé ! Il se barre ! ». C'est la seule phrase dont nous nous rappelons tous.
Mais tout ça, avait pris beaucoup de temps. La foule commenceait à tourner son regard dur vers nous. Connaissant les risques de la loi de la rue (qui voit très mal les voleurs), nos agresseurs prenaient la fuite.
Nos systèmes nerveux se relachèrent .. Mais pas le temps de réfléchir. J'accourus vers Charline, qui avait la main au cou, par reflexe. Elle était un peu sonnée.
Quand elle la retira, elle était toute rouge ...
(à suivre dans : au secours)